mardi 15 juin 2010

Arnold Schwarzenegger dans la guerre du feu. (Sécheresse et incendies en Californie)

Si l’on compare le Figaro et le Monde sur le sujet des incendies en Californie, le second donne davantage d’informations que son concurrent. L’un comme l’autre se bornent toutefois à commenter des communiqués de presse sans tenir compte de leur double arrière-plan. Le premier concerne les pompiers qui encourent toujours les mêmes risques sur le terrain, mais dont l’image publique s’appesantit à coups de métaphores pompeuses empruntées au monde militaire (exemple : les soldats du feu). L’hommage prend alors une forme tellement appuyée et automatique qu’elle en perd de son intérêt pédagogique. Le lecteur ou l’auditeur plongent tête baissée dans l’émotion, au lieu de réfléchir sur le contexte californien : l’extension des surfaces urbanisées, des périmètres susceptibles d’être ravagés par les incendies. Ils en oublient au passage que les pompiers ne verraient pas d’un mauvais œil une mesure visant à limiter l’extension des constructions, et donc à faciliter leur action.
Le second arrière-plan concerne le gouverneur de l’Etat, Mr. Schwarzenegger. Qu’il songe à prolonger son mandat actuel lors d’une prochaine élection me semble tout à fait logique. Mais il est néanmoins regrettable que la presse se fasse l’écho, sans aucun recul, de simples effets d’annonce. L’offre d’une récompense de 100 000 dollars pour capturer le pyromane ne changera rien à l’incendie, et n’améliorera pas la tâche des pompiers. Sur le malheur d’autrui, le gouverneur aura en revanche soigné (presque) à bon compte sa popularité. Dans le dernier paragraphe de l’article du Monde, on trouve pour finir un bilan des incendies californiens et l’idée d’une aggravation récente des dégâts : 38 000 km² brûlés en 2006, contre 35.000 l’an passé. Faute d’informations précises sur le sujet, on peut simplement supposer que les incendies révèlent surtout une pression immobilière grandissante plus qu’une aggravation du risque naturel ; l’auteur n’en souffle mot.
Car la localisation de l’incendie (« à deux cents kilomètres de Los Angeles ») laisse peu de place à la description des paysages de l’aire urbaine la plus éclatée qui soit. Elle ne dit rien du caractère indéfini du sud-ouest de la Californie, souvent à mi-chemin entre l’urbain et le rural. L.A. rentre à peine dans un rectangle de deux cents kilomètres sur cinquante. Ses dix mille km² équivalent à la surface de l’Alsace, mais dans le sens Ouest – Est et non Nord – Sud. Et la ville s’étend encore chaque année : CARTE. Le mitage (construction de maisons individuelles très espacées) gagne les hauteurs périphériques, caractéristique d’une population aisée et sur - motorisée qui cherche à s’extraire de la cohue et à habiter au-dessus du brouillard de pollution qui recouvre l’agglomération les jours sans vent.
Une entame de phrase retient l’attention pour finir : « Sujette à un climat méditerranéen voire désertique, la Californie, touchée par deux hivers très pluvieux puis un été caniculaire… » Avec des totaux pluviométriques inférieurs à 400 millimètres, Los Angeles et le sud de la Californie appartiennent plutôt au domaine semi-aride. Il ne reste de vaguement méditerranéen que l’alternance saisonnière entre un semestre estival sans pluies et un semestre hivernal avec pluies. En cela, la comparaison avec le Sahel convient tout aussi bien. Les besoins en eau d’une zone urbaine de quinze à vingt millions d’habitants ne correspondent absolument pas au potentiel naturel, ce qui entraîne un pompage systématique des nappes superficielles puis profondes. Si l’on ajoute des vents constants prêts à attiser les flammes, la végétation naturellement adaptée au manque d’eau – le chaparral équivaut au maquis – propage mécaniquement l’incendie. Les arbres et haies de jardins obtenus grâce à l’arrosage constituent des relais pour le feu, sans même parler des maisons construites en bois (proportion en Californie ?).
Des Californiens victimes et propagateurs et un gouverneur ancienne vedette de cinéma et fin communiquant. Pour compléter, un dossier de la FAO.

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