Il y a dans cet article de Michel Deguy de quoi écrire plusieurs papiers. Mais je préfère formuler dès le départ les questions qui me sont venues au fur et à mesure de la lecture. Je ne cache pas qu’elles constituent autant de réserves par rapport à l’article cité…
Dans le titre même, il évoque la destruction de Paris, puis (dans le texte) « une transformation dévastatrice de [la] Ville » : quels quartiers et quels bâtiments sont-ils visés ? Dans la phrase « On a détruit les grandes et belles avenues, jadis à la fois encombrées et rapides, les voici découpées en couloirs incompréhensibles, obstruées de trottoirs médians au profit de sinistres allées centrales avec leurs arrêts de bus en guérites – miradors au milieu de la chaussée », n’y a-t-il pas deux propositions non corrélées (avec de surcroît une destruction non démontrée) ?
« Paris n’est plus une très grande ville » : dans quelle mesure, et qu’est-ce qui justifie cette affirmation ? « Le commerce a horreur du vide? Qu’on lui donne (?) les grandes places et les larges trottoirs ;» peut-il, ce commerce, subsister sans clients, c’est-à-dire sans piétons (si décriés par Michel Deguy) ?
Peut-on poser une question comme « A-t-on augmenté le nombre des taxis et des bus? » et y répondre de façon aussi vague : « Nullement. A Londres, ils se touchent; à New York on ne voit qu’eux. Ici on les cherche. » Si Paris est donnée aux piétons, comment l’auteur justifie-t-il ensuite que « La Ville lumière est passée au couvre-feu, couvre-vie ». Comment explique-t-il que les touristes – qu’il ne porte apparemment pas dans son cœur – sont « très importants, certes, mais secondaires. Le tourisme n’est pas le but, mais la bonne conséquence. » ?
Il faudrait enfin à Paris « renoncer à la gloire et à la modernité. Ce qui précisément arrive: le Comité olympique ne s’y est pas trompé. » Si l’on suit donc Michel Deguy, Bernard Delanoë aurait sciemment sabordé la candidature de sa ville pour les Jeux Olympiques. Quelque chose me chiffonne : j’ai encore en tête les commentaires selon lesquels – à l’époque – le maire en avait fait des tonnes ; mais je n’ai pas entendu qu’on lui reprochât de s’opposer à cette candidature.
Allons plus loin. Michel Deguy ausculte Paris, même s’il ne donne aucune précision sur l’origine, l’année de départ des transformations qu’il regrette ; « c’était mieux avant… » ? Que met-il en lumière ? En France, plus peut-être que dans le reste du monde occidental, le citadin sort moins de chez lui – finis les bistrots – y compris à Paris. Quand il est rentré chez lui, il préfère acheter plus cher de la nourriture déjà cuisinée par d’autres, que de passer du temps à la préparer : les commerces ne manquent pas, qui lui vendent des kebabs, des pizzas, des surgelés, ou que sais-je encore.
Dans la typologie des enseignes, un rétrécissement s’est progressivement opéré au détriment des boutiques concurrencées par la grande distribution, comme les drogueries, les boutiques d’outillage, les fromagers ou les marchands des quatre-saisons. L’auteur résume d’une phrase le phénomène : « La fripe a rasé la librairie ». Les magasins de vêtements abondent, mais dans le cas présent, il convient de rappeler l’impact du prix unique sur le livre, transformé par Jack Lang en bien coûteux. Les Leclerc, Carrefour et autres enseignes s’accommodent juste à cette législation.
Le commerce ambulant s’immisce – nous dit l’auteur – dès que le moment de la semaine le permet, le week-end en particulier. Une fois obtenue l’autorisation municipale, il grignote l’espace libre des grandes places et des larges trottoirs. Mais l’influence de la mairie peut-elle à elle seule expliquer son succès ? Les tréteaux illustrent à mon sens le fait que l’offre suscite la demande, et non l’inverse. Prenons un cas concret : personne n’a créé les marchés de Noël à Paris et un peu partout dans les grandes villes françaises à la suite de manifestations de consommateurs !
Sur les prix de l’immobilier et leurs conséquences – les hôtels insalubres brûlent, les églises ou les gymnases sont occupés, les loyers montent. Il faut ‘construire’» – je me permets de faire un renvoi vers un de mes papiers récents…
Il reste enfin la question des transports. Je la garde au chaud pour un peu plus tard. L’allusion de l’auteur à la situation des taxis servira de transition. Il constate en effet que leur nombre semble ne pas bouger ; en le regrettant ? Pourtant, les taxis parisiens portent SEULS la responsabilité d’un numerus clausus. Suivant les règles de ce sacro-saint privilège respecté par les majorités politiques successives, on ne peut s’improviser chauffeur sans s’inscrire au préalable sur une liste d’attente et payer une obole confortable …
La libéralisation du marché permettrait de pallier ce désagrément, mais je doute fort de convaincre quiconque à Libération !
Dans le titre même, il évoque la destruction de Paris, puis (dans le texte) « une transformation dévastatrice de [la] Ville » : quels quartiers et quels bâtiments sont-ils visés ? Dans la phrase « On a détruit les grandes et belles avenues, jadis à la fois encombrées et rapides, les voici découpées en couloirs incompréhensibles, obstruées de trottoirs médians au profit de sinistres allées centrales avec leurs arrêts de bus en guérites – miradors au milieu de la chaussée », n’y a-t-il pas deux propositions non corrélées (avec de surcroît une destruction non démontrée) ?
« Paris n’est plus une très grande ville » : dans quelle mesure, et qu’est-ce qui justifie cette affirmation ? « Le commerce a horreur du vide? Qu’on lui donne (?) les grandes places et les larges trottoirs ;» peut-il, ce commerce, subsister sans clients, c’est-à-dire sans piétons (si décriés par Michel Deguy) ?
Peut-on poser une question comme « A-t-on augmenté le nombre des taxis et des bus? » et y répondre de façon aussi vague : « Nullement. A Londres, ils se touchent; à New York on ne voit qu’eux. Ici on les cherche. » Si Paris est donnée aux piétons, comment l’auteur justifie-t-il ensuite que « La Ville lumière est passée au couvre-feu, couvre-vie ». Comment explique-t-il que les touristes – qu’il ne porte apparemment pas dans son cœur – sont « très importants, certes, mais secondaires. Le tourisme n’est pas le but, mais la bonne conséquence. » ?
Il faudrait enfin à Paris « renoncer à la gloire et à la modernité. Ce qui précisément arrive: le Comité olympique ne s’y est pas trompé. » Si l’on suit donc Michel Deguy, Bernard Delanoë aurait sciemment sabordé la candidature de sa ville pour les Jeux Olympiques. Quelque chose me chiffonne : j’ai encore en tête les commentaires selon lesquels – à l’époque – le maire en avait fait des tonnes ; mais je n’ai pas entendu qu’on lui reprochât de s’opposer à cette candidature.
Allons plus loin. Michel Deguy ausculte Paris, même s’il ne donne aucune précision sur l’origine, l’année de départ des transformations qu’il regrette ; « c’était mieux avant… » ? Que met-il en lumière ? En France, plus peut-être que dans le reste du monde occidental, le citadin sort moins de chez lui – finis les bistrots – y compris à Paris. Quand il est rentré chez lui, il préfère acheter plus cher de la nourriture déjà cuisinée par d’autres, que de passer du temps à la préparer : les commerces ne manquent pas, qui lui vendent des kebabs, des pizzas, des surgelés, ou que sais-je encore.
Dans la typologie des enseignes, un rétrécissement s’est progressivement opéré au détriment des boutiques concurrencées par la grande distribution, comme les drogueries, les boutiques d’outillage, les fromagers ou les marchands des quatre-saisons. L’auteur résume d’une phrase le phénomène : « La fripe a rasé la librairie ». Les magasins de vêtements abondent, mais dans le cas présent, il convient de rappeler l’impact du prix unique sur le livre, transformé par Jack Lang en bien coûteux. Les Leclerc, Carrefour et autres enseignes s’accommodent juste à cette législation.
Le commerce ambulant s’immisce – nous dit l’auteur – dès que le moment de la semaine le permet, le week-end en particulier. Une fois obtenue l’autorisation municipale, il grignote l’espace libre des grandes places et des larges trottoirs. Mais l’influence de la mairie peut-elle à elle seule expliquer son succès ? Les tréteaux illustrent à mon sens le fait que l’offre suscite la demande, et non l’inverse. Prenons un cas concret : personne n’a créé les marchés de Noël à Paris et un peu partout dans les grandes villes françaises à la suite de manifestations de consommateurs !
Sur les prix de l’immobilier et leurs conséquences – les hôtels insalubres brûlent, les églises ou les gymnases sont occupés, les loyers montent. Il faut ‘construire’» – je me permets de faire un renvoi vers un de mes papiers récents…
Il reste enfin la question des transports. Je la garde au chaud pour un peu plus tard. L’allusion de l’auteur à la situation des taxis servira de transition. Il constate en effet que leur nombre semble ne pas bouger ; en le regrettant ? Pourtant, les taxis parisiens portent SEULS la responsabilité d’un numerus clausus. Suivant les règles de ce sacro-saint privilège respecté par les majorités politiques successives, on ne peut s’improviser chauffeur sans s’inscrire au préalable sur une liste d’attente et payer une obole confortable …
La libéralisation du marché permettrait de pallier ce désagrément, mais je doute fort de convaincre quiconque à Libération !
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