Dans mon papier daté du 24 janvier, je disséquais un article de Michel Deguy consacré à Paris, à ses transformations récentes. Après l’argumentaire économique, il me restait à aborder la question de la circulation. L’allusion de l’auteur à la situation des taxis arrivait en conclusion… L’auteur constate en effet que leur nombre reste fixe, or les taxis parisiens portent SEULS la responsabilité d’un numerus clausus. Suivant les règles de ce sacro-saint privilège respecté par les majorités politiques successives, on ne peut s’improviser chauffeur sans s’inscrire au préalable sur une liste d’attente et payer une obole confortable … Seule la libéralisation du marché permettrait de pallier ce désagrément.
Avant de passer au crible l’argumentaire de l’auteur, il me faut d’abord louer sa saine irrévérence à l’encontre de deux thèmes attrape-nigauds. Le premier concerne le vélo et le second le lien entre la politique de la voiture et la pollution. Car le vélo ne répond à aucune des définitions de la voiture : sans moteur, sans place pour un passager, sans coffre, sans toit pour la pluie et sans carrosserie pour le froid ou contre les chocs…! Il ne s’agit pas de le classer en bien ou en mal, de vanter (ou non) les pistes cyclables : la démarche consistant à mettre dans une sorte de balance le vélo et la voiture est une imposture intellectuelle.
Au sujet de la pollution atmosphérique, la politique municipale a-t-elle provoqué la réduction du nombre de voitures dans l’aire urbaine ? Pas que l’on sache. N’a-t-elle pas induit davantage de bouchons, c’est-à-dire davantage de moteurs qui tournent en même temps ? Le choix d’une limitation forte des voitures à l’intérieur de Paris se justifie ; il faudrait cependant laisser de côté le prétexte de la défense de l’environnement. Celui-ci offre sans doute un confort intellectuel à celui qui le profère, mais ne résiste pas à une remise en cause étayée.
Pour le reste, je développerai mes remarques en deux temps. Car il y a chez Michel Deguy une envie de gueuler que je compte bien respecter. Son impression et son dépit ne souffrent pas de discussion. Un mot suffira donc. Les bus se font rares parce qu’ils déplaisent à la majorité, tout simplement. Dans les enquêtes d’opinion, leurs utilisateurs les jugent bruyants, sales, avec des conducteurs trop brusques, des marches d’accès trop hautes… Ou trop glissantes les jours de pluie ! Les bus pâtissent enfin d’une tare rédhibitoire : ils ne peuvent s’extraire des bouchons. Au tramway, l’auteur accole l’adjectif obsolète : à quel titre ? Il ne présente en tout cas pas l’inconvénient précédent d’être pris dans les bouchons, et son installation coûte deux à trois fois moins cher que le métro. Certains provinciaux, à Rennes ou à Toulouse entendront la différence.
Après avoir évoqué une transformation dévastatrice de Paris, Michel Deguy s’enferre. « On a détruit les grandes et belles avenues, jadis à la fois encombrées et rapides, les voici découpées en couloirs incompréhensibles, obstruées de trottoirs médians au profit de sinistres allées centrales avec leurs arrêts de bus en guérites – miradors au milieu de la chaussée. Partout les panneaux contradictoires, les Decaux exhibitionnistes, les interdictions peintes sur le bitume. La ville fléchée à mort se traîne. » Je retranscris sa souffrance, mais ne choisit-il pas ici le registre intransmissible de l’émotion ?
L’attaque centrale menée par l’auteur touche à la politique de la mairie de Paris. « Montparnasse, Port-Royal, Gobelins, Saint-Marcel, Rivoli, Magenta, Sébastopol, Jean-Jaurès, l’axe Pigalle-Père-Lachaise, des kilomètres d’autres voies étranglées. Tout doit s’enfiler dans une interminable queue leu leu monomaniaque d’un exode harassé. » Il veut donner l’impression d’une déraison incompréhensible des responsables politiques. Quelques élus prendraient-ils plaisir à violenter leurs concitoyens ? Cela paraît difficile à croire. Bien au contraire, le choix de la mairie de Paris répond à un impératif clair, entériné par le vote des habitants (1) : la restriction de la circulation automobile par suppression des double – sens et par diminution du nombre de voies.
Michel Deguy tient en même temps à faire des propositions : « Démolir tout ce qui réduit la largeur des voies et des vues, et punir durement les ‘obstructeurs’ […] Tant qu’il y aura de l’automobile, de tout format, c’est-à-dire vraisemblablement encore pendant tout le siècle, il est capital (c’est le cas de le dire) que les flux de circulation aient leur fluidité. » On estimait en 1990 (Direction Régionale de l’Equipement) que – compte tenu du réseau grande voirie d’Île de France – 100.000 voitures circulant en même temps provoquent des embouteillages. Avec plus de 6.000.000 de voitures, les solutions-miracles existent-elles en 2007 ?
Bien au calme derrière mon ordinateur, je peux toujours regretter que nul n’ait pris plus tôt le taureau par les cornes ; et puis ? Au regard des exemples récents de Stockholm ou de Londres, il existe des solutions un peu différentes sur la forme que celle choisie à Paris. Sur le fond, le maire ne dispose d’aucune marge de manœuvre.
(1) Pour que les banlieusards votent pour élire le maire de Paris, il faut tout simplement porter le nombre d’arrondissements à 25 ou 30. Il semble toutefois que cette option ne suscite pas l’unanimité…
Avant de passer au crible l’argumentaire de l’auteur, il me faut d’abord louer sa saine irrévérence à l’encontre de deux thèmes attrape-nigauds. Le premier concerne le vélo et le second le lien entre la politique de la voiture et la pollution. Car le vélo ne répond à aucune des définitions de la voiture : sans moteur, sans place pour un passager, sans coffre, sans toit pour la pluie et sans carrosserie pour le froid ou contre les chocs…! Il ne s’agit pas de le classer en bien ou en mal, de vanter (ou non) les pistes cyclables : la démarche consistant à mettre dans une sorte de balance le vélo et la voiture est une imposture intellectuelle.
Au sujet de la pollution atmosphérique, la politique municipale a-t-elle provoqué la réduction du nombre de voitures dans l’aire urbaine ? Pas que l’on sache. N’a-t-elle pas induit davantage de bouchons, c’est-à-dire davantage de moteurs qui tournent en même temps ? Le choix d’une limitation forte des voitures à l’intérieur de Paris se justifie ; il faudrait cependant laisser de côté le prétexte de la défense de l’environnement. Celui-ci offre sans doute un confort intellectuel à celui qui le profère, mais ne résiste pas à une remise en cause étayée.
Pour le reste, je développerai mes remarques en deux temps. Car il y a chez Michel Deguy une envie de gueuler que je compte bien respecter. Son impression et son dépit ne souffrent pas de discussion. Un mot suffira donc. Les bus se font rares parce qu’ils déplaisent à la majorité, tout simplement. Dans les enquêtes d’opinion, leurs utilisateurs les jugent bruyants, sales, avec des conducteurs trop brusques, des marches d’accès trop hautes… Ou trop glissantes les jours de pluie ! Les bus pâtissent enfin d’une tare rédhibitoire : ils ne peuvent s’extraire des bouchons. Au tramway, l’auteur accole l’adjectif obsolète : à quel titre ? Il ne présente en tout cas pas l’inconvénient précédent d’être pris dans les bouchons, et son installation coûte deux à trois fois moins cher que le métro. Certains provinciaux, à Rennes ou à Toulouse entendront la différence.
Après avoir évoqué une transformation dévastatrice de Paris, Michel Deguy s’enferre. « On a détruit les grandes et belles avenues, jadis à la fois encombrées et rapides, les voici découpées en couloirs incompréhensibles, obstruées de trottoirs médians au profit de sinistres allées centrales avec leurs arrêts de bus en guérites – miradors au milieu de la chaussée. Partout les panneaux contradictoires, les Decaux exhibitionnistes, les interdictions peintes sur le bitume. La ville fléchée à mort se traîne. » Je retranscris sa souffrance, mais ne choisit-il pas ici le registre intransmissible de l’émotion ?
L’attaque centrale menée par l’auteur touche à la politique de la mairie de Paris. « Montparnasse, Port-Royal, Gobelins, Saint-Marcel, Rivoli, Magenta, Sébastopol, Jean-Jaurès, l’axe Pigalle-Père-Lachaise, des kilomètres d’autres voies étranglées. Tout doit s’enfiler dans une interminable queue leu leu monomaniaque d’un exode harassé. » Il veut donner l’impression d’une déraison incompréhensible des responsables politiques. Quelques élus prendraient-ils plaisir à violenter leurs concitoyens ? Cela paraît difficile à croire. Bien au contraire, le choix de la mairie de Paris répond à un impératif clair, entériné par le vote des habitants (1) : la restriction de la circulation automobile par suppression des double – sens et par diminution du nombre de voies.
Michel Deguy tient en même temps à faire des propositions : « Démolir tout ce qui réduit la largeur des voies et des vues, et punir durement les ‘obstructeurs’ […] Tant qu’il y aura de l’automobile, de tout format, c’est-à-dire vraisemblablement encore pendant tout le siècle, il est capital (c’est le cas de le dire) que les flux de circulation aient leur fluidité. » On estimait en 1990 (Direction Régionale de l’Equipement) que – compte tenu du réseau grande voirie d’Île de France – 100.000 voitures circulant en même temps provoquent des embouteillages. Avec plus de 6.000.000 de voitures, les solutions-miracles existent-elles en 2007 ?
Bien au calme derrière mon ordinateur, je peux toujours regretter que nul n’ait pris plus tôt le taureau par les cornes ; et puis ? Au regard des exemples récents de Stockholm ou de Londres, il existe des solutions un peu différentes sur la forme que celle choisie à Paris. Sur le fond, le maire ne dispose d’aucune marge de manœuvre.
(1) Pour que les banlieusards votent pour élire le maire de Paris, il faut tout simplement porter le nombre d’arrondissements à 25 ou 30. Il semble toutefois que cette option ne suscite pas l’unanimité…
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