Ecoutons Isabelle Rey-Lefebvre (ici): l’investissement dans l’immobilier dit professionnel a connu une croissance de 1 300 % au cours de la dernière décennie. « En effet, les montants investis en France ont explosé, passant de 1 milliard d’euros en 1996 à 26 milliards en 2006, selon les chiffres du cabinet de conseil CB Richard Ellis. » A l’origine de l’engouement, on trouve des sociétés américaines, aujourd’hui encore très présentes : « GE Real Estate France est désormais à la tête d’un patrimoine de 5 milliards d’euros ; la moitié de ses avoirs sont localisés en Europe ». Viennent ensuite les banques allemandes puis des sociétés espagnoles dont les noms indiquent à eux seuls les bénéfices réalisés dans la péninsule grâce à la bulle immobilière. Les sociétés foncières françaises apparaissent à partir de l’an 2000.
La journaliste avance comme unique facteur déclenchant la loi de finances de 2003 ; mais ce qui précède montre qu’il n’y pas concordance dans les dates, que le mouvement est plus ancien. Admettons tout de même l’acte fondateur, sous la responsabilité de Jean-Pierre Raffarin, qui occupait à l’époque le poste de premier ministre. De quoi s’agit-il ? La loi de finances crée pour les sociétés précédemment évoquées un statut d’exception (dit de transparence fiscale).
Les sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC) ne paient pas l’impôt sur les sociétés ; « ce sont leurs actionnaires qui déclarent les dividendes perçus et payent l’impôt qui en découle. […] Les SIIC ont l’obligation de distribuer 85 % de leurs bénéfices et, dans les deux ans, 50 % des plus-values dégagées lors de la vente des immeubles. » Il faut croire que la contrepartie demeure séduisante. Le privilège a même été étendu (SIIC 2 et SIIC 3), qui autorise une entreprise à vendre son patrimoine immobilier « à ces sociétés cotées en payant un impôt de 16,5 % (au lieu de 33 %) sur la plus-value dégagée. » Effet garanti.
Isabelle Rey-Lefebvre noie malheureusement ce beau poisson dans le reste de son article, en ajoutant quelques chiffres sur les cours en bourse, un commentaire lénifiant, et une conclusion sibylline : « Attention, si les perspectives de loyers des bureaux et commerces sont bonnes pour les deux ou trois années à venir, il est difficile de prévoir au-delà, avertit-il. Et je trouve que le cours des actions de ces sociétés est très haut, donc sans grand espoir de plus-value. » Car les particuliers ne peuvent accéder – sauf erreur de ma part – à ce type d’investissements. Ils en ressentent en revanche les effets indirects.
« Selon que vous serez riche et puissant »… L’injustice peut révolter le particulier ou même le patron de PME. Il faut bien voir pourtant que l’intention manifeste des autorités était de favoriser l’investissement (par l’immobilier), de stimuler le secteur du bâtiment et l’emploi, par voie de conséquence. Voyons un peu plus loin… Car un mot manque : défiscalisation. Rien d’autre – je souligne – n’explique la ruée vers l’investissement dans l’immobilier professionnel. L’économie (française et plus largement européenne) tourne à petit régime, explique les spécialistes à longueur de colonnes. Le marché est établi, sans rentrée d’acteurs majeurs. Enfin, l’offre en fonds de commerce et bureaux – concurrence entre centres-villes et périphérie oblige – paraît pléthorique.
Mais le rythme des constructions d’immeubles ou d’ouverture de magasins ne faiblit pas : l’argent afflue pour les raisons évoquées plus haut. J’aurais toutefois quelques difficultés à approfondir l’amorce d’analyse économique de ce qui me fait penser à un cercle non vertueux. J’en subodore les conséquences géographiques. Les prix pratiqués par les entreprises du bâtiment dans ce segment de l’immobilier professionnel sont tirés vers le haut, avec une interaction probable sur leurs prix dans l’immobilier pour particuliers. J’imagine par ailleurs que si le professionnel présente davantage d’intérêt que le particulier, ce dernier passe après… Jusqu’à ce que les rentabilités se rejoignent. L’ajustement par le haut signifie je suppose – c’est à cela que je voulais arriver – la constitution d’une bulle immobilière artificiellement alimentée par l’Etat.
Dans l’immédiat, les classes moyennes ne peuvent suivre l’envolée des prix des loyers ou du mètre-carré à l’achat. Elles s’installent en périphérie des grandes villes et roulent davantage en voiture, ce qui nous ramènent à des papiers précédents !
Bulle, vas-tu éclater ?
La journaliste avance comme unique facteur déclenchant la loi de finances de 2003 ; mais ce qui précède montre qu’il n’y pas concordance dans les dates, que le mouvement est plus ancien. Admettons tout de même l’acte fondateur, sous la responsabilité de Jean-Pierre Raffarin, qui occupait à l’époque le poste de premier ministre. De quoi s’agit-il ? La loi de finances crée pour les sociétés précédemment évoquées un statut d’exception (dit de transparence fiscale).
Les sociétés d’investissement immobilier cotées (SIIC) ne paient pas l’impôt sur les sociétés ; « ce sont leurs actionnaires qui déclarent les dividendes perçus et payent l’impôt qui en découle. […] Les SIIC ont l’obligation de distribuer 85 % de leurs bénéfices et, dans les deux ans, 50 % des plus-values dégagées lors de la vente des immeubles. » Il faut croire que la contrepartie demeure séduisante. Le privilège a même été étendu (SIIC 2 et SIIC 3), qui autorise une entreprise à vendre son patrimoine immobilier « à ces sociétés cotées en payant un impôt de 16,5 % (au lieu de 33 %) sur la plus-value dégagée. » Effet garanti.
Isabelle Rey-Lefebvre noie malheureusement ce beau poisson dans le reste de son article, en ajoutant quelques chiffres sur les cours en bourse, un commentaire lénifiant, et une conclusion sibylline : « Attention, si les perspectives de loyers des bureaux et commerces sont bonnes pour les deux ou trois années à venir, il est difficile de prévoir au-delà, avertit-il. Et je trouve que le cours des actions de ces sociétés est très haut, donc sans grand espoir de plus-value. » Car les particuliers ne peuvent accéder – sauf erreur de ma part – à ce type d’investissements. Ils en ressentent en revanche les effets indirects.
« Selon que vous serez riche et puissant »… L’injustice peut révolter le particulier ou même le patron de PME. Il faut bien voir pourtant que l’intention manifeste des autorités était de favoriser l’investissement (par l’immobilier), de stimuler le secteur du bâtiment et l’emploi, par voie de conséquence. Voyons un peu plus loin… Car un mot manque : défiscalisation. Rien d’autre – je souligne – n’explique la ruée vers l’investissement dans l’immobilier professionnel. L’économie (française et plus largement européenne) tourne à petit régime, explique les spécialistes à longueur de colonnes. Le marché est établi, sans rentrée d’acteurs majeurs. Enfin, l’offre en fonds de commerce et bureaux – concurrence entre centres-villes et périphérie oblige – paraît pléthorique.
Mais le rythme des constructions d’immeubles ou d’ouverture de magasins ne faiblit pas : l’argent afflue pour les raisons évoquées plus haut. J’aurais toutefois quelques difficultés à approfondir l’amorce d’analyse économique de ce qui me fait penser à un cercle non vertueux. J’en subodore les conséquences géographiques. Les prix pratiqués par les entreprises du bâtiment dans ce segment de l’immobilier professionnel sont tirés vers le haut, avec une interaction probable sur leurs prix dans l’immobilier pour particuliers. J’imagine par ailleurs que si le professionnel présente davantage d’intérêt que le particulier, ce dernier passe après… Jusqu’à ce que les rentabilités se rejoignent. L’ajustement par le haut signifie je suppose – c’est à cela que je voulais arriver – la constitution d’une bulle immobilière artificiellement alimentée par l’Etat.
Dans l’immédiat, les classes moyennes ne peuvent suivre l’envolée des prix des loyers ou du mètre-carré à l’achat. Elles s’installent en périphérie des grandes villes et roulent davantage en voiture, ce qui nous ramènent à des papiers précédents !
Bulle, vas-tu éclater ?
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